Vote au dessus d’un nid de citoyens

Retour sur le Conseil Communal de Schaerbeek du 27 mai 2015 – TTIP

TTIP Schaerbeek

L’action citoyenne n’est pas une mince affaire. Elle l’est encore un peu moins quand il s’agit de mobiliser sur un traité bilatéral entre les USA et l’Union Européenne qui de prime abord peut apparaît bien loin du terrain. Les effets d’un tel traité, s’il était conclu dans les termes d’aujourd’hui se feraient pourtant largement sentir au niveau communal et risqueraient de mettre à mal son autonomie et ses choix politiques. Que ceux qui sont les chevilles ouvrières et les chevilles tout court de cette mobilisation soient remerciés !

Hier les citoyens présents au CC1030 ont pu voir le PS faussement heurté par la tournure des événements, quitter la salle avant un vote sur le TTIP. Mais loin d’être réellement choqué, le PS schaerbeekois évitait juste par cette attitude de révéler ses propres contradictions.

Reprenons le fil des événements.

Après une interpellation citoyenne le mois dernier, le Conseil communal de Schaerbeek avait à son ordre du jour les différentes motions déposées par différents conseillers communaux. L’ordre du jour les plaçait dans l’ordre chronologique de leur dépôt. La motion que le collectif de citoyens souhaitait voir débattue et adoptée était la dernière. Ces points étaient, comme c’est toujours le cas pour de telles motions, planifiés en fin de conseil. Il ne fallait pas voir dans cet ordre des travaux une volonté de «fatiguer «  les schaerbeekois venus assister aux débats. Cette attente leur a d’ailleurs permis de suivre les 37 premiers points, les débats sur la stratégie en matière de logement social à l’occasion du rapport 2014 du Foyer Schaerbekkois, les priorités de la commune en matière de mobilité ou les orientations de l’enseignement spécial.

Le Conseil s’est ensuite penché sur les 4 motions concernant le TTIP.

Les auteurs des 3 premières les ont retirées pour donner place à celle qui était proposée par les citoyens. Celle-ci a donné lieu à une prise de position assez claire des différents groupes politiques sur le fond du sujet. Les élus PS, Ecolo-Groen, le PTB, au nom de leurs groupes, ont exprimé leur soutien à ce texte en l’état. Le MR a quant à lui marqué son désaccord. La Liste du Bourgmestre a proposé un amendement remplaçant la majeure partie du texte par un autre, différent et très nettement moins engagé en terme de demandes aux instances concernées par la négociation. La représentante du CDH a dit qu’elle s’abstiendrait sur le texte après avoir appelé à voter pour l’amendement, même si le CDH est contre le TTIP. Finalement, elle ne s’est d’ailleurs pas abstenue.

C’est évidemment désagréable pour tous ceux qui souhaitaient l’adoption d’un texte fort et sans équivoque mais les voix de la Liste du Bourgmestre, du CDH et du MR (22 voix) représentaient une majorité. C’est désagréable mais pas anti-démocratique.

C’est alors que le PS, dans un grand brouhaha, prenant prétexte de la procédure qu’il a qualifiée de « simulacre de démocratie » (sic) a choisi de quitter l’assemblée et donc de ne pas voter le texte amendé.

Il ne faut pas s’y tromper. On est loin de la dénonciation d’une stratégie soit-disant démocratiquement indigne. Rien n’interdit de transformer profondément un texte par amendement. Le PS, comme tous les groupes politiques qui sont en désaccord avec un texte, est coutumier de cette façon de faire. En quittant l’assemblée avant le vote final, le PS schaerbeekois (comptant dans ses rangs la Présidente de la Fédération bruxelloise du PS et le chef de cabinet du Ministre-Président de la Région qui sont tout sauf des novices en politique!) évitait de devoir voter contre un texte faible qui n’est autre que l’exact reflet des textes faibles que le PS a fait adopter là où il est aux responsabilités. Une belle esbroufe en public au conseil communal, conseil qui n’aura pas à se prononcer sur l’entrée en vigueur de ce texte s’il aboutit un jour. Par contre, là où les votes comptent, comme en commission du Parlement Européen dès le lendemain, les socialistes votent pour un nouveau (mauvais) mandat aux négociateurs du TTIP.

Enfin, la sortie du représentant du PTB dans la foulée de elle des socialistes était encore un peu moins compréhensible.

PS et PTB ont donc laissé les 7 élus verts seuls pour voter contre ce mauvais texte.

La soirée s’est terminée dans une certaine confusion, laissant une bonne partie des citoyens présents sur leur faim. La plupart l’étaient sur le fond car comme nous, ils considéraient que le texte final ne répondait pas à leurs attentes. Beaucoup l’étaient aussi sur la forme car, peu familiers du règlement des assemblées, la procédure leur est apparue comme incompréhensible ou partisane, ce qui n’était pas le cas. La démocratie (locale) est faite de confrontations de points de vue et de rapports de force, politiques et arithmétiques. C’est cela et rien d’autre qui s’est passé mercredi soir au CC1030.

Mais ce vote n’est en rien la fin du travail. Il a permis d »identifier les positions mais aussi les postures des élus communaux, en cohérence ou en opposition avec celles qui sont prises dans d’autres enceintes. Chacun jugera, en connaissance des règles du jeu. Ceci n’enlève rien à la nécessité de poursuivre le travail sur le TTIP à tous les échelons de la représentation politique et de l’action citoyenne.