Bruxelles à l’heure portugaise, du PE et des relations UE-Afrique

La semaine commence pour moi par la réunion à Lisbonne du Bureau de l’Assemblée Parlementaire de l’Union pour la Méditerrannée, où je représente le Parlement européen, et durant laquelle, sous présidence portugaise, nous préparerons la plénière qui se tiendra en octobre prochain. Le thème central en sera les migrations. C’est un sujet brûlant en ces périodes où les effets de la crise repoussent à plus tard et plus loin ces questions si importantes pour les pays des deux rives de la Méditerrannée et produisent des larmes de crocodile chez la plupart des européens quand une embarcation de demandeurs d’asile coule en mer, quand elle n’est pas refoulée dans l’indifférence générale.

Le directeur de l’OIM*,  qui était notre invité ainsi que le maire de Ceuta, sera on ne peut plus clair : « les instruments de la politique de migration sont complètement dépassés ». Les migrations de demain ne demandent pas nécessairement des frontières totalement ouvertes mais des migrations légales et beaucoup plus de libre circulation. Elles sont multilatérales, Sud-Sud et Nord-Sud. Les flux financiers qu’elles génèrent depuis les diasporas vers les pays d’origine sont considérables et les taux d’intérêts pratiqués par les pays d’accueil sur ces flux sont inappropriés pour ne pas dire usuriers . Quant à l’Union Européenne, elles ferait bien de ne pas seulement mener une politique de protection avec Frontex, mais une politique de droits.

Nous en avons discuté formellement, en préparation à la rencontre d’octobre prochain, qui se doublera d’une rencontre des Présidents des Parlements et de la société civile, mais aussi informellement, à table, en faisant le point sur le contexte politique local.  Les portugais font partie des européens qui souffrent particulièrement des effets de la crise. La Présidente de l’Assemblée nationale portugaise et quelques uns des élus nous expliqueront que la confiance des citoyens portugais dans leur Président, leur Premier Ministre, leurs institutions est en chute libre, sauf, fait nouveau, dans leur Parlement. Une grande partie des manifestations y aboutit et c’est au Parlement, dans sa diversité politique, qu’on présente les doléances et les colères.

Paradoxes : nous traiterons de ces questions dans l’hémicycle du Sénat qui a été supprimé (le bicaméralisme a vécu au Portugal et seule l’Assemblée Nationale est aujourd’hui en charge du travail parlementaire). Quant à la conférence de presse finale présentant les engagements concrets autour de ce thèmes, elle se déroulera dans une salle majestueuse, décorée de peintures murales reprenant les scènes de l’esclavage et de la colonisation. Le regard hagard de ces africains enchaînés et maltraités et celui des valeureux navigateurs portugais donnait une consonance toute particulière à nos présentations…

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Une fois n’était plus coutume et le redevient (depuis près d’un an, en raison de la fragilité du plafond de l’hémicycle bruxellois plus aucune plénière ne s’y est tenue, mais il est aujourd’hui parfaitement renforcé) : une séance dite « mini » plénière du PE (2 jours au lieu de 4 comme c’est habituellement le cas à Strasbourg et le sera pour la dernière fois a la mi-avril) se tiendra à Bruxelles mercredi et jeudi, en parallèle du sommet UE-Afrique et de la visite de Ban Ki Moon.

Pour une fois depuis longtemps, nous aurons l’occasion d’entendre et d’interpeller Catherine Ashton sur une série de questions (Iran, Russie-Ukraine entre autres). Les dossiers législatifs ne sont pas non plus anodins ….

Tout le monde étant à Bruxelles, c’est cette semaine qui a été choisie pour la dernière task force Union européenne-autorités belges. On y fera, avec le Ministre-président de la Région, deux Vice-premiers Ministres fédéraux, le Commissaire européen et moi-même au nom du Parlement européen, le bilan des 5 années écoulées, les dossiers décidés et mis en œuvre (dont la Maison de l’Histoire de l’Europe dans le Parc Leopold, l’extension des locaux administratifs du Parlement, les écoles européennes) ceux qui tardent mais aussi les litigieux (comme les charges d’urbanisme). Plus largement, il faudra faire le point sur ces relations entre les Institutions européennes, la Belgique fédérale et la Région bruxelloise, relations qui seront appelées je l’espère à changer, à trouver des développements nouveaux bons pour Bruxelles et les Bruxellois, l’UE et les européens et le métissage de tous ceux-là.

Le Sommet UE-Afrique se déroulera en marge de cette plénière. C’est important. Il y a fort à parier qu’il aura moins de retentissement que les visites des présidents des USA et de la Chine. Et pour cause, ce continent voisin est si souvent mis de côté ou regardé au départ avant tout des intérêts économiques de l’UE (comme c’est le cas pour ce qui concerne les Accords de Partenariat Économique). C’est donc une opportunité à saisir pour mettre aussi sur table les intérêts des sociétés civiles, des forces vives locales et régionales. Côté européen et africain, il faut  mobiliser des  financements pour l’économie réelle, l’agriculture paysanne, les énergies renouvelables.  L’éducation et la formation doivent être prioritaires dans la coopération UE-Afrique.

Enfin, la semaine se terminera par « Dessine-moi l’Europe », une journée de débats interactifs (avec des intervenants hors pairs, européens et transnationaux) pour redonner sens et essence à une Europe plus verte et plus fédérale. Les moments culturels et sportifs n’ont pas été oubliés dans cette journée,qui sera pilotée par Dany Cohn Bendit. Ce sera à Flagey, de midi a minuit et il y a déjà près de 1000 inscrits…

 

* Organisation Internationale pour les Migrations