On l’a appris ce week-end, à l’issue d’une énième rencontre au sommet : il y aura donc bien une « liquidation accompagnée » du Holding communal Dexia qui sera actée au lendemain de la Saint-Nicolas. C’est moins grave qu’une faillite brutale, certes. Mais les conséquences seront néanmoins désastreuses à plusieurs niveaux. Pour les finances régionales (les garanties régionales seront activées et les billets de trésorerie perdus), pour les finances fédérales (le budget fédéral sera mis à contribution via Dexia et directement à hauteur de quelques 250 millions €) et même pour quelques institutions qui s’en seraient bien passé, tel le Fonds bruxellois du Logement.
A Schaerbeek, la commune est le plus gros actionnaire bruxellois du holding, les citoyens vont également payer, sous différentes formes, les conséquences de cette gabegie à tous ces étages.
Comme mandataires communaux, nous mesurons le désastre pour les finances de notre commune, déjà largement sous pression en raison de la paupérisation d’une partie toujours plus importante de la population, pour laquelle l’épargne est une fiction et pour qui les fins de mois commencent le 15.
Cette décision de liquidation du Holding aggrave-t-elle la situation ? Oui et non. Non, parce qu’on savait qu’elle était inéluctable, mais oui, dans la mesure où elle noircit encore les perspectives budgétaires à venir, pour notre commune comme pour d’autres. Aucun dividende de 2010 ne sera versé et il n’y a donc plus rien à attendre dans l’avenir, alors que nous devrons encore rembourser (le capital et les charges d’intérêts) des 8 millions d’euros que nous avons empruntés, à la demande pressante de l’Etat fédéral, pour soutenir Dexia en 2009, et que nous avons perdu 6 autres millions dans cette même opération.
Les récents propos du Ministre fédéral des finances n’ont fait que nous fâcher un peu plus. Alors qu’il est représenté au sein du Holding communal via un « commissaire du Gouvernement » et qu’il était le mieux placé pour connaître le fonctionnement du Holding de l’intérieur et pour suivre ses orientations et les orientations de Dexia, le voilà qui tente de faire croire que ce n’est qu’une histoire « de roue qui tourne », les communes actionnaires ayant accumulé des dividendes fabuleux du temps du Crédit Communal.
M. Reynders met en cause la stratégie d’investissement des communes dans « des institutions financières ou des montages complexes » et feint d’ignorer l’histoire. Si elles étaient actionnaires de DEXIA (via le Holding communal), ce n’est pas par choix de spéculation sur les marchés financiers, via achat des actions d’une banque privée. Mais bien parce qu’elles sont le partenaire historique d’une banque publique au service des communes, le Crédit communal, devenu DEXIA au fil de divers mouvements stratégiques dans le courant des années 1990. Qui est responsable de l’évolution des institutions financières, des produits toxiques qu’elles ont acquis avec l’argent des communes, de leurs stratégies foireuses, du mariage à sens unique avec la France, de la stratégie Mariani-Dehaene, de l’absence de régulation du secteur financier et tout le reste. Les communes ? La commune de Schaerbeek ?
Restons sérieux. Schaerbeek va donc devoir assumer la charge de ce gâchis et une perte substantielle de recettes. En 2009, après l’augmentation du capital de Dexia, les parts de Schaerbeek dans le holding communal étaient estimées à 53 millions d’euros, soit pas moins de 15% de ses actifs. Qu’en restera t-il au 7 décembre ? Pas grand chose sans doute ! Cette diminution des actifs de la commune constitue une dégradation de sa solvabilité et pourrait rendre encore plus difficile (ou à tout le moins plus cher) de futurs emprunts, pourtant nécessaires, au vu du boom démographique qui nous attend, pour financer l’équipement futur de notre commune.
Il faudra rendre des comptes aux Schaerbeekoises et aux Schaerbeekois, c’est sûr. Face au péril financier que cette crise fait peser sur les communes, les mandataires communaux et la population sont en droit de connaitre les raisons de cette banqueroute. Nous voulons comprendre ce qui relève de la responsabilité du management, des actionnaires, des administrateurs et ce qui relève des circonstances extérieures à la banque.
Le holding communal est à 100% détenu par les communes du Royaume et donc est dirigé par leurs représentants. Le holding communal déléguait au sein du conseil d’administration de Dexia deux administrateurs, en étant le second actionnaire de Dexia et représentant 14,1% de son capital. C’était donc un actionnaire majeur qui disposait théoriquement d’un pouvoir réel d’influence. Faut-il rappeler que les rémunérations de ces administrateurs publics représentant le holding avoisinent les 40.000 € par an… Face aux besoins criants des communes actionnaires, ces administrateurs avaient pourtant le devoir d’interroger les stratégies mises en place.
Pour tenter de remettre DEXIA sur bon chemin après 2008, quelle a été la position des administrateurs publics de Dexia ? Quel mandat ont-ils reçu du CA du Holding ? Ces administrateurs ont-ils joué leur rôle ? Etaient-ils assez outillés face à la technicité que requiert la gestion d’une banque ? Les partis ont-ils envoyé les personnes les plus compétentes dans un mandat aussi important ou s’agissait-il uniquement de récompenser certains gros faiseurs de voix ou bons soldats ?
Au nom de tous les citoyens, de Schaerbeek ou d’ailleurs, nous voulons comprendre. Il est démocratiquement indispensable que le Parlement fédéral mette rapidement sur pied une commission d’enquête parlementaire pour faire la lumière à ce sujet.
les conseillers communaux Schaerbeekois Isabelle Durant et Vincent Vanhalewyn (Ecolo).