Neighbours and friends : what’s new in the East ?

Tel était le titre du panel que j’ai co-présidé ce vendredi à l’Université Adam Mickiewicz de Poznan, dans les deux journées organisées par les Verts européens. Passionnant.

Nous avons voulu ces deux journées en Pologne, en soutien aux Verts polonais qui tentent d’émerger dans le paysage politique polonais et aux acteurs de la société civile.

Faire le point sur ce qui se passe aux frontières de l’Union, en Russie après la glasnost, en Ukraine après la révolution orange, en Belarus où les récentes élections n’ont pas été des plus clean, en Moldavie. Au moment où les révolutions arabes tentent d’engager une transition démocratique, quels sont les liens et les points communs, les leçons à tirer des différentes situations, les actions politiques à réévaluer et entreprendre ?

 A la table ce matin, 3 intervenants passionnants. Une journaliste polonaise, Mme Kurczab-Redlich, qui a vécu 15 ans en Russie et qui continue d’ensuivre de près l’évolution politique et qui a perdu nombre de ses amis dont Anna Politovskaïa, assassinée il y a quelques années.Un chercheur spécialisé dans la politique de voisinage, Mr Lang, d’une Université allemande. Enfin, Juri Durkot, un journaliste ukrainien.

 Ils ont brossé un tableau lucide, mais assez sombre de la situation démocratique chez nos voisins de l’Est. Sur la Russie, les vérités qui sont véhiculées en Europe sont partielles, partiales. On fait semblant nous dit notre invitée, que rien ne s’y passe. On s’inquiète de la prison d’Abougraïb, mais on ne dit rien sur les enfermements en Russie, les tortures, les pressions, l’internement des opposants, la censure et les écoutes téléphoniques, les disparitions et assassinats de journalistes. On dit que les partis d’opposition représentent 10%, mais on ne dit pas qu’il faut pour en créer un quelques 50.000 signatures avec adresse et téléphone. Et il en faut du courage pour s’exposer ainsi. On encense Poutine, reçu avec tous les honneurs par les chefs d’Etat, salué par Chirac, décoré par le chancelier Schroeder, mais on ne dit rien de sa fortune évaluée à 44 milliards de dollars.

Quant à la politique de voisinage et les conditionnalités des accords d’association avec ces pays sont à revoir (tout comme d’ailleurs la politique de voisinage avec l’autre côté de la Méditerranée dont on ne peut pas dire, au vu des événements récents et ce qu’ils révèlent au grand jour, que l’Europe a à s’enorgueillir).  A l’est,  ses résultats s’apparentent aussi plutôt à un échec : la situation économique et démocratique stagne voire régresse. Le risque est grand, avec ce qui se passe aux frontières sud de l’UE, qu’une nouvelle indifférence se fasse jour dans cette partie du monde, jusqu’au jour où des populations, à nouveau, se soulèveront

Mr Durkot nous a brossé un tableau assez dur de la situation en Ukraine : attaques contre la presse libre, les journalistes indépendants, accusations et procès absurdes, gain de pouvoir des services secrets, corruption en pleine expansion, entre autres avec la coupe d’Europe 2012.

Il empruntera la voie de l’allégorie pour traduire ce qui s’est passé ces dernières années, depuis la révolution orange de 2004. Il nous racontera l’histoire d’un pays fictif dans les Balcans, où règne un roi aimé de son peuple, et qui confie la gestion à ses ministres. En voyage dans son pays, le roi constate qu’alors qu’il a libéré des sommes importantes pour l’entretien des routes, le pont qu’il doit traverser est toujours en mauvais état. Il constate surtout que l’argent destiné à le réparer a été employé à construire une chapelle juste avant le pont pour dire une prière avant de le traverser ! Et il conclura : en Ukraine, on n’a pas réparé les ponts, on a construit des chapelles. Il n’y a pas non plus eu de changement des élites. En Russie nous dira-t-il, tout le monde s’est mis à vendre et à acheter. On y a vendu à peu près tous les biens publics au privé qui sont aujourd’hui dans les mains des oligarques. En Ukraine, ils ont même vendu ce qui ne leur appartenait pas, à savoir le gaz et le pétrole russe.

A nous de tisser du lien, avec les oppositions, la société civile,  les journalistes, les défenseurs des droits de l’homme, comme on l’a fait ces deux jours, comme on l’a fait en proposant l’association russe « Memorial » pour le prix Sakharov. Inlassablement.