…mais ce sera sans doute moins le cas aujourd’hui à Washington, pour les premières
rencontres Netanjahou/ Abbas, à l’invitation du président Obama et en présence du président Egyptien et du roi de Jordanie. Un peu plus affaiblie encore par un attentat qui aura tué 4 personnes et revendiqué par la branche armée du Hamas. Inacceptable, même si l’espoir de résultats de cette négociation était quasi nul de tous les côtés.
A Borzée, vendredi 27 août dernier, nous organisions une conférence ayant pour thème
Dialogue pour une paix juste entre Israël et la Palestine, avec Leila Shahid et Nurit Peled
Pourquoi avoir décidé dans ces Rencontres d’Eté de consacrer une des grandes conférences à ce dialogue si difficile et douloureux ? Ce serait plutôt le contraire qui aurait été interpellant. La construction d’une paix juste est un objectif soutenu par tous les Verts Européens. Nous sommes tous concernés par ce contentieux qui nourrit, ici et là-bas, tous les extrémismes.
L’arrivé d’Obama à la présidence des USA a constitué pour tous les tenants de la paix un formidable espoir. Ses marges de manoeuvre étaient pourtant étroites, et nous le savions. Elles le sont toujours, surtout à la veille de l’élection de mi-mandat. Deux ans plus tard, notre déception est donc à la hauteur des espoirs engrangés. Certes, en cette période de remontée de l’antisémitisme et de l’islamophobie, nous avons tous apprécié la prise de position courageuse d’Obama, au nom du droit, en soutien à la construction d’un centre de culture et de religion musulmane dans le quartier de Ground Zero. Mais cela ne suffira pas.
Les USA n’ont que mollement condamné l’assaut du Mavi Marmara qui en mai dernier a coûté la vie à 9 personnes turques, et à propos duquel on n’est pas vraiment dans le scénario d’une enquête internationale, mais plutôt dans la multiplication des enquêtes partielles et partiales, et cela alors que l’assaut a été donné dans les eaux internationales.
Côté européen, on a certes été un peu plus clair, et le fait que Mme Ashton, la Haute Représentante aux Affaires Etrangères de l’UE se soit rendue deux fois à Gaza depuis son entrée en fonction n’est pas anodin. Mais l’UE reste divisée, non sur la volonté de construire la paix -, mais sur les moyens pour y arriver, les sanctions à appliquer, les signaux à donner.
Le Parlement Européen a été un petit peu plus loin en envoyant à Gaza une mission des commissions Developpement et Budget. Approche intéressante car les parlementaires qui se sont rendus sur place, qui ont pu constater l’absence de recontruction, la non utilisation des fonds européens consacrés à cet effet par défaut d’entrée du matériel, et plus généralement l’étau autour de la population de Gaza, ce ne sont pas les parlementaires « habituels » de la commission des affaires étrangères, aux positions archi-connues. C’est un pas intéressant.
Les Verts sont particulièrement engagés au PE sur cette question de la paix au Proche Orient. Et même s’il y a parfois quelques nuances entre nous, sur les 4 grands groupes politiques du PE, c’est le plus clair, le plus cohérent.
Toujours dans cette volonté de sortir des catégories, d’être ouverts à toutes les expressions en faveur de la paix, Dany Cohn Bendit en tant que co-président de notre groupe, et moi-même en tant que vice-présidente du PE, nous avons invité et parrainé le démarrage de J’Call, en présence de pas mal de personnalités européennes et israéliennes. Il s’agit d’un appel à la raison lancé par des citoyens européens juifs, à la diaspora israélienne d’Europe. Il dénonce entre autres l’occupation et les implantations qui non seulement constituent une faute politique et morale, mais délégitime et fragilise Israël en tant qu’Etat juif démocratique. Ce faisant, il réduit un plus encore la possibilité de créer un Etat palestinien souverain et viable.
C’est vrai, cet appel est à certains égards constestable…et constesté. Mais il a le mérite de faire bouger les lignes, et ce n’est pas rien.
Ce qui se passe là-bas, à Gaza, en Cisjordanie, à Jérusalem Est n’est pas sans rapport avec ce qui se passe ici, en Europe, en Belgique, à Schaerbeek, Molenbeek ou Anvers…ou ailleurs dans le monde. On peut discuter sans fin sur « l’importation du conflit ». Mais une chose est évidente : plus encore que ce qui se passe en Afghanistan, ce qui se vit sur cette bande de terre a des retentissements évidents, et c’est normal. Cet interminable conflit est au coeur des questions du monde contemporain.
Le fait que la Turquie ait accueilli cet été des milliers de touristes en provenance du Moyen Orient qui se disent » chez eux » dans la Turquie d’Erdogan n’est pas sans importance. La Turquie d’Erdogan qui se lasse des tergiversations européennes pour son adhésion. Nous ne mesurons peut-être pas encore l’importance de ce nouveau positionnement turc, non seulement à l’échelle du monde mais aussi à l’échelle de ce qui se vit entre les communautés juives et arables aux 4 coins du monde.
Pour discuter de tout cela, nous avions invité deux femmes, deux militantes de la paix, dont les engagements sont clairs et sans faille. Deux femmes parce que nous pensions et pensons toujours que c’est peut-être l’heure des femmes.
L’une d’elle c’est Nurit Peled, citoyenne israélienne et professeur en sciences de l’éducation à l’université de Jérusalem. Concernée dans sa chair puisqu’elle a perdu sa fille de 14 ans dans un attentat commis par un palestinien, elle continue pourtant inlassablement à oeuvrer pour la paix, comme son père, ex-général de l’armée israélienne qui s’est dressé contre l’occupation. Elle est l’une des chevilles ouvrières du Tribunal Russel.
La seconde, c’est Leila Shahid, déléguée de la Palestine auprès de la Belgique et de l’UE. Elle dit qu’elle est une ‘ambassadrice pas comme les autres’. C’est bien vrai. Elle est bien plus qu’une simple porte-parole.
Pendant une heure et demi, ces deux femmes ont fait bouger les lignes. Elles nous ont fait dépasser la logique des camps, palestinien contre israélien. Elles ont plaidé pour le soutien toutes ces initiatives nouvelles, ces groupes mixtes, palestiniens et israéliens, indépendants des partis politiques qui réseautent par internet et pas sms, un peu comme les jeunes opposants iraniens. Elles nous parlent de la responsabilité des mères, celles qui ont oublié leur rôle et qui ont transformé leur utérus en trésor national.
Elles nous rappellent que ce conflit est l’affaire du monde entier, de l’Europe, du monde arabe. Et ce n’est pas une « négociation directe » entre Netanyaou etAbbas (celle qui s’annonce pour les prochains jours, sous les auspices de Barack Obama, en présence du roi de Jordanie) qui apportera la solution. Toute la communauté internationale doit assumer sa responsabilité. Car tant que celle-ci ne bougera pas, malgré 45 ans d’occupation (la plus longue occupation de l’histoire) cessera d’accepter que toutes les résolutions adoptées soient inappliquées et bafouées, tant qu’elle considérera Israël comme « un enfant gâté », il n’y aucune raison que les dirigeants israéliens changent leur point de vue ou leur stratégie. La situation d’aujourd’hui, c’est aussi la faute du monde, pas seulement ces protagonistes.
Nurit Peled aura des mots très durs sur « le mur mental qui grandit dans les têtes israéliennes, paniquées, endoctrinées ». Elle parlera aussi des manuels scolaires, de l’éducation raciste qui est donnée aux enfants israéliens. Elle en parle, assume ses propos et jouit d’une grande liberté d’expression. Mais comme elle le dira, d’une liberté d’expression, caractéristique d’une démocratie israélienne…réservée aux juifs.
Toutes deux conclueront en disant que dans les deux camps, les citoyens israéliens et palestiniens, veulent la pais. Mais tous perdent confiance sur les moyens pour y arriver. Et chaque négociation directe qui échoue affaiblit les tenants de la négociation…
On ne fera pas tout le tour de la question. Ce n’était pas le but.