Ce lundi démarrait officiellement à Luanda (capitale de l’Angola qui, 8 ans après la fin d’une guerre civile meurtrière,vit des heures de croissance économique qui en font une sorte de « Monaco de l’Afrique », affichant avec insolence sa richesse) la session plénière de l’Assemblée Paritaire UE/ACP. Un jargon européen qui signifie une rencontre de parlementaires européens et africains qui contrôlent et suivent une série de questions communes, entre autres en matière de commerce entre l’Europe et les pays africains, des Caraïbes et du Pacifique (d’où l’appellation ACP).
Luanda : une grande ville qui dimanche soir, à mon arrivée, m’est apparue comme plutôt calme et bien organisée, mais aujourd’hui, lundi, comme assez chaotique. Voitures, congestion, 4X4, pas de transport en commun, pas de taxis.. On se croirait plus au Brésil qu’en Afrique : la langue bien sûr (on parle portugais et les traces de la colonie sont assez présentes). La richesse n’est pas qu’apparente : ici, m’a-t-on dit, un appartement se loue à 10.000 dollars par mois ! Pas de classe moyenne : des riches, très riches, concentrés dans les quartiers du centre et puis beaucoup beaucoup de pauvres, très pauvres, plus loin vers la périphérie, vivant en bidonvilles.
Ce matin, il ne m’a fallu que 2h30 pour obtenir mon badge d’accréditation pour pouvoir entrer dans le Parlement qui accueille cette assemblée de parlementaires. Deux heures que j’ai passées à converser avec un fonctionnaire européen hongrois. Très intéressant de l’écouter sur l’état d’esprit, la nostalgie souvent, qui prévaut en Hongrie par rapport à ‘l’avant’. L’avant adhésion, mais surtout l’avant chute du rideau de fer. Ce rideau de fer que les hongrois perçoivent aujourd’hui comme un rideau de papier où ils ne sont perçus que comme des ombres chinoises : pas les mêmes accès que les autres européens, pas le même regard sur eux, pas les mêmes droits…
Après ce détour par l’Est de l’Europe, retour en séance plénière d’ouverture.
Louis Michel est co-président de cette assemblée et avec le ton enflammé qui est le sien, il se lance dans bien plus qu’ un discours d’accueil.
Il salue chaleureusement le Président angolais Dos Santos. Il aurait pu se passer du chaleureusement : ce président est un corrompu pas très fréquentable, c’est le moins que l’on puisse dire…Il interpelle le futur ex-commissaire au développement, Karel De Gucht. Il va même jusqu’à appeler à ce que la politique de développement ne soit pas le bras armé de la politique extérieure de l’Union. J’en reste baba tant je me rappelle, au niveau belge, lorsque nous étions ensemble au gouvernement, qu’il disait et faisait très exactement le contraire : la coopération au développement devait dépendre des affaires étrangères. Mais à l’époque, c’était lui qui était ministre des affaires étrangères !! Il plaide pour une taxe sur les billets d’avion et sur les transactions financières ! Et nous parle des dangers de ce qu’il appelle la « tyrannie majoritaire » c’est-à-dire les comportements de ceux qui sont élus avec beaucoup (trop) de voix et dont les gouvernements laissent en rade les parlements. Il pointe enfin une loi en voie d’adoption en Ouganda, qui criminaliserait l’homosexualité.
Quelques discours encore, dont celui du Président angolais, assez creux mais très applaudi.
La séance est donc ouverte, officiellement cette fois.
Une intéressante discussion s’engage avec le commissaire De Gucht. Les questions qui lui sont adressées par des parlementaires européens et africains sont de différentes nature. Depuis les APE (accords de partenariat économique) jusqu’aux droits de l’homme en passant par toute une série de dossiers importants comme les effets de la crise alimentaire, les ressources naturelles, etc..
Un parlementaire malien relève à juste titre que la condamnation par les européens de cette future loi ougandaise réprimant l’homosexualité, si elle n’est pas illégitime, fait un peu deux poids deux mesures : qu’est-ce que l’Europe trouve à dire sur le résultat du referendum en Suisse demandant l’interdiction de la construction des minarets .?
Bien vu. Mais le commissaire répondra clairement : s’il n’a rien à dire formellement à la Suisse, qui est un état tiers, il déplore le résultat de ce référendum et juge cette procédure de consultation mal adaptée à des sujets aussi sensibles que celui-la. Je suis d’accord avec lui.
La journée se terminera en danse et musique…
- Louis Michel et Eva Joly, présidente de la commission developpement du PE